Le ciné-tourisme est en plein essor ! Harry Potter a sans doute été l’un des précurseurs en la matière, suivi de près par la série Game of Thrones dont le succès a transformé Dubrovnik en destination touristique phare et Les Chroniques de Bridgerton qui ont propulsé le quartier londonien de Greenwich sur le devant de la scène touristique. On pourrait aussi citer Emily in Paris qui a dopé l’attractivité de la capitale française auprès d’un jeune public international ou encore Le Seigneur des Anneaux qui continue d’attirer des milliers de visiteurs chaque année pour admirer les paysages de Nouvelle-Zélande. Si toutes les productions ne connaissent évidemment pas le même succès et ne peuvent donc pas générer un impact aussi conséquent, le cinéma ou la fiction en général se révèlent être un potentiel économique et médiatique riche qui incite de plus en plus de territoires à se positionner comme terres d’accueil de tournages.
Au programme sur votre écran :
- Coup de projecteur sur les enjeux de l’accompagnement de la réalisation d’un film
- Zoom sur le rôle d’Auvergne-Rhône-Alpes Cinéma
- La nouvelle formation de Trajectoires Tourisme à destination des territoires
- Le prequel du tournage
- Du décor de ciné au cadre de vacances : focus sur des succès en région et leurs retombées touristiques
- Post-production : quelle stratégie adopter ?
Coup de projecteur sur les enjeux de l’accompagnement de la réalisation d’un film
La croissance du tourisme motivé par les lieux de tournage est en telle croissance que le CNC (Centre National du Cinéma) lui a consacré une étude parue début 2024. Les chiffres parlent d’eux-mêmes :
Près de 9 touristes étrangers sur 10 ont vu un film ou une série française, souvent via les plateformes de streaming et 80 % déclarent que cela leur a donné envie de visiter la France. Ce phénomène concerne aussi les productions étrangères tournées en France (comme Lupin, Emily in Paris ou Mission Impossible), qui ont incité 78 % des spectateurs à envisager un voyage. L’impact est concret : 1 touriste sur 10 affirme avoir pris la décision de venir après un visionnage.
Pour les Français, l’effet est similaire à l’échelle locale : 66 % disent que les films et séries leur ont donné envie de découvrir les lieux de tournage, et 1 sur 4 l’a effectivement fait : on constate donc un décalage entre l’idée et la transformation. Les retombées sont toutefois excellentes en termes d’image puisque 83% des touristes exposés trouvent que le contenu audiovisuel véhicule une image positive de la région mise en avant.
Visite des régions de France après avoir vu un film ou une série en particulier
Base : Ensemble (260 touristes français – 256 touristes étrangers)
Des retombées économiques directes
À l’heure où les finances publiques sont scrutées à la loupe, les bénéfices du Septième Art ne peuvent qu’être salués : hôtellerie, transport, restauration, commerce, location d’espaces, installations éphémères, embauche de professionnels du son ou de la lumière, figuration etc. sont autant d’apports immédiats et concrets pour chaque territoire accueillant une production.
Bien que plus complexes à mesurer, des retombées indirectes sont bien sûr générées : notoriété, fréquentation touristique à plus long terme, attractivité résidentielle et entrepreneuriale complémentaire au travail de la marque territoriale. C’est sur ce volet en particulier que les offices de tourisme ont leur carte à jouer pour maximiser les « retours sur investissement » : bien accueillir puis bien valoriser un film, c’est augmenter d’autant la promotion de la destination et sa fréquentation, donc l’économie et l’emploi.
Zoom sur le rôle d’Auvergne-Rhône-Alpes Cinéma, LE partenaire majeur des destinations pour accueillir des tournages
Tapis rouge pour Aurélie Malfroy, Responsable Bureau d’accueil des tournages, qui assurera la formation proposée par Trajectoires Tourisme fin septembre. Son rôle de lien entre cinéma et terrain est en effet essentiel pour les destinations qui reçoivent des équipes de cinéma.
Auvergne- Rhône-Alpes Cinéma, “la bande passante” entre productions et territoire
Depuis près de 35 ans, l’organisme a pour mission de développer la filière cinématographique et audiovisuelle en région à travers 4 axes :
- Accompagner financièrement la production et co-produire
Une enveloppe de 5 millions d’euros est ainsi redistribuée aux films et séries tournées en Auvergne-Rhône-Alpes et validés par un panel d’experts. Un zoom garanti sur les richesses et le potentiel touristique ! - Valoriser le territoire régional auprès des équipes cinématographiques
Cela implique autant la promotion des décors naturels et culturels que du tissu industriel et économique en passant par les talents et les compétences locales qui sont autant d’atouts pour la réalisation des fictions. Faciliter l’implantation des films et des séries comprend ainsi, au-delà de l’aide financière éventuelle, l’accompagnement dans la collaboration entre lieux de tournage, prestataires, techniciens experts et productions. C’est là qu’intervient Aurélie Malfroy, généralement main dans la main avec les collectivités et leurs offices de tourisme. - Accompagner le développement en travaillant à la source
Les auteurs et les réalisateurs peuvent être soutenus et formés avec ou par la Région dès la création de leur œuvre pour fixer localement les talents de demain. Une chance donc pour qu’ils ancrent leur récit dans l’histoire et les paysages régionaux. - Communiquer autour de ces missions
Pour qu’élus, partenaires et même grand public soient autant d’ambassadeurs de la région comme plateau de cinéma. L’appui aux nombreux festivals organisés en Auvergne-Rhône-Alpes, le lien avec les salles et les réseaux d’exploitants, la gestion des avant-premières sont autant d’autres opérations de communication majeures menées par l’organisme pour que la destination au sens large soit en haut de l’affiche.
Notre formation : Les tournages de films et séries au service de la promotion du territoire
En 2025, Auvergne-Rhône-Alpes Cinéma et Trajectoires Tourisme s’associent pour faire naître une formation parfaitement adaptée aux territoires. Destinée aux personnels en charge de la promotion et de le l’attractivité du territoire (OGD ou collectivité territoriale), elle a pour but de donner des clés pour atteindre plusieurs objectifs :
- Valoriser son territoire comme destination de tournage
- Accueillir une équipe de tournage
- Déployer une stratégie de communication autour du film
Le préquel du tournage
La mise en lumière d’un territoire commence bien avant de recevoir l’équipe ! Il faut en effet être en mesure de valoriser toutes les pépites, et souvent les plus cachées, d’une destination pour capter l’intérêt des équipes de tournage. Une perception fine du territoire, de sa géographie, de son architecture, de son tissu d’entreprises, la connaissance de personnalités marquantes et de l’histoire, une représentation de l’identité locale sont autant d’atouts qui feront la différence pour qu’un lieu soit choisi. Mais sans connaître les mécanismes d’attractivité du secteur du cinéma, la tâche est ardue pour créer la bonne connexion ! Accueillir un tournage c’est en effet être en capacité d’apporter un accompagnement personnalisé à chaque production.
L’implication des relais locaux est donc très marquée en amont de la réalisation, pour le repérage mais aussi sur un volet logistique pour faciliter la réalisation au quotidien : hébergement, restauration, transport… Après une phase calme pendant le tournage, les collectivités sont de nouveaux régulièrement associées à la post-production et à la diffusion : c’est là que le bénéfice touristique durable se crée.
Du décor de ciné au cadre de vacances
La page la plus visitée du site Internet d’Auvergne-Rhône-Alpes Cinéma est d’ailleurs… « lieux de tournage ». Tout est dit !
Susciter l’envie de poursuivre la découverte amorcée dans le film en accompagnant le lancement de ce dernier à travers des avant-premières ou d’autres opérations de valorisation est l’une des missions majeures d’Aurélie Malfroy. En effet, le décor d’un film n’est pas d’emblée un booster de fréquentation touristique mais nécessite de mener une démarche globale d’accompagnement et de promotion.
La Maurienne a ainsi bénéficié de retombées durables suite au tournage d’une partie de la trilogie Belle et Sébastien (2013) car l’Office de tourisme s’est saisi du sujet pour en faire un outil de communication, à l’instar d’un circuit vélo toujours proposé plus de 10 ans après le film.
Les Gorges de la Loire proposent un circuit pédestre sur les traces de Louise Violet pour découvrir les lieux emblématiques parcourus par Alexandra Lamy et Grégory Gadebois, encore une manière de prolonger les retombées du tournage.
Le Palais Idéal du Facteur cheval multiplié sa fréquentation par 2 après la sortie du film L’Incroyable Histoire du facteur Cheval avec Laetitia Casta et Jacques Gamblin en 2018. Une hausse de fréquentation qui reste réelle en 2025 malgré la pause COVID et qui est bien une conséquence directe de la sortie en salle, confirmée par l’afflux de touristes allemands en 2023 après la projection de la version germanique selon Raphaëlle Lambert, adjointe au patrimoine du site culturel drômois. En revanche, l’impact a été naturel, la communication étant verrouillée par la production. Seule exception mais en amont du film : des visites du site en l’état de tournage (jardins recouvertes, costumes d’époque…) ont été proposées au public pour les Journées européennes du Patrimoine en 2017 et ont connu un grand succès.
Focus sur un grand succès en région : Un p’tit truc en plus
Responsable promotion et presse de l’office de tourisme Saint-Marcellin Vercors Isère, Stéphanie Carlizza a accompagné l’équipe de tournage de l’immense succès cinématographique d’Artus Un petit truc en plus. Habituée des accueils de journalistes ou tour-opérateurs en éductour, Stéphanie avoue que la réception d’une production est bien différente !
La société de production d’Artus l’a contactée directement en amont du film pour être aidée dans sa recherche de lieux sur ce secteur identifié entre Grenoble et Valence et donc très accessible, « une condition sine qua non » précise-t-elle. La connaissance pointue du territoire a permis à Stéphanie de leur indiquer des espaces précis en montagne et pour les scènes sur la rivière, des sites validés par Artus et l’équipe technique venus en personnes pour confirmer les repérages.
La production a ensuite confié à l’office de tourisme la recherche d’hébergements le temps des prises de vue : un défi pour la salariée qui a dû activer tous ses réseaux pour dénicher les lits suffisants en pleine saison touristique !
Temps calme ensuite : silence, on tourne !
Mais à la sortie du film, le rythme reprend avec le soutien d’Auvergne-Rhône-Alpes Cinéma pour promouvoir les panoramas du film. L’équipe d’accueil de l’office de tourisme a également connu un pic de contacts et notamment des appels pour louer le gîte de la colonie d’Artus (qui s’avère être un logement privé !). Plus d’un an après la sortie en salle, l’effervescence est retombée mais Stéphanie Carlizza capitalise toujours sur le grand succès cinématographique : une page du dossier de presse de la destination est dédiée à cette thématique, ce qui a généré des retombées dans la presse locale et nationale et suscite des demandes de journalistes, dont des voyages presse et de blogueurs ! Un article de blog est dédié au tournage et fonctionne aussi très bien.
Des retombées touristiques indirectes
La responsable promotion et presse précise qu’il est compliqué d’estimer précisément les retombées que ce soit financièrement ou en termes d’image pour Saint-Marcellin Vercors Isère, même si le ressenti est incontestablement bon. Un élément concret toutefois : les recettes de la taxe de séjour ont été bien supérieures l’année du tournage grâce à la présence de l’équipe sur une longue durée ! Hébergeurs et restaurateurs ont également fait part de leur satisfaction pendant plusieurs mois à l’issue du film. Le tissu économique local a été impacté positivement de manière plus large d’après l’office de tourisme : « Une belle aventure humaine très ancrée localement, en lien avec les acteurs du territoire, qui a permis de créer une cinquantaine d’emplois et de donner un rôle à une quinzaine de comédiens de la région. »
En synthèse : quelle stratégie adopter ?
Pour capitaliser au maximum sur l’opportunité offerte au territoire par le tournage d’un film, les destinations doivent se professionnaliser : savoir répondre aux exigences des productions, valoriser les lieux filmés et anticiper les retombées touristiques. La formation proposée en ce sens par Trajectoires Tourisme invite ainsi les collectivités et leurs offices de tourisme à mieux structurer leur offre pour transformer un plateau de tournage en moteur de fréquentation durable. Le ciné-tourisme peut en effet être une mode très éphémère pour un territoire, sauf à savoir faire perdurer les fruits du projet.
La formation destinée essentiellement aux directeurs d’Office de tourisme et à leurs responsables communication, même néophytes sur ce sujet, aborde ainsi la forme comme le fond, et propose notamment un travail sur le contenu afin de savoir nourrir les outils de communication sur la base de la production cinématographique, comment éditorialiser le tournage au bénéfice du territoire. « Il s’agit d’une initiation à l’univers du cinéma pour ouvrir le champ des possibles » précise Aurélie Malfroy.
En effet, aucune règle unique n’existe pour optimiser l’accueil d’un film. Les avant-premières, les accueils de techniciens et acteurs sont généralement des valeurs sûres, mais qui n’ont pas toujours un impact à moyen ou long terme sur la fréquentation touristique ou l’image, d’autant plus que certaines productions ou diffuseurs verrouillent communication et événementiel autour du film. Auvergne-Rhône-Alpes cinéma est un partenaire et conseiller majeur des territoires en ce sens : des clauses sont prévues au contrat lors de coproductions pour assurer une implication des terres d’accueil y compris a posteriori.
Au-delà de l’impact en termes d’image et de notoriété, de l’inscription de la destination dans une base de données nationale des sites d’accueil, des actions purement liées à la sortie en salle, des opérations touristiques peuvent être lancées : la création d’itinéraires dédiés voire de visites guidées, la mise en ligne d’une rubrique consacrée aux lieux de tournage pour les faire découvrir aux locaux comme aux touristes, la création d’une carte interactive des lieux de tournage, l’accueil de journalistes sur une thématique tourisme et cinéma… Ces actions assurent un retour sur investissement plus étalé dans le temps et une meilleure gestion des flux touristiques sur plusieurs années et plusieurs espaces.
Les productions renforcent ainsi l’image positive des régions, stimulent les achats de produits locaux et sont de puissants leviers d’attractivité territoriale. Accueillir un tournage, c’est donc investir dans une vitrine culturelle, touristique et économique à fort rendement, surtout dans une ère où l’image a un pouvoir d’influence sans précédent.
Votre prochaine séance sur le sujet : à vos agendas !
Auvergne-Rhône-Alpes Tourisme vous donne rendez-vous les 6 et 7 octobre 2025 à l’Hôtel de Région à Lyon pour parler de ce thème qui sera mis développé dans l’une des sessions organisées aux Sommets du Tourisme. Chaque jour, venez vous informer et échanger autour des tournages de films et de séries avec Auvergne-Rhône-Alpes Cinéma.
Inscriptions aux Sommets du Tourisme (à partir du mois de juillet) et à la session sur l’accueil de tournages :
Site professionnel de l’ART : https://pro.auvergnerhonealpes-tourisme.com/